Toute cette merde n'a aucun sens. À moins d'un mouvement global parfaitement organisé, toute négation des règles de base menant à l'anarchie ne représente qu'une immense connerie. Et l'absence de nos bourreaux en dit long sur les représailles qui nous attendent.
Je dois trouver Berlioz.
Je slalome entre chaque individu galvanisé par je ne sais quelle émotion, évitant les contacts et les poings lancés dans ma direction. Je lève les pieds pour ne pas tomber sur les corps d'étourdis étalés sur le sol, riant à gorge déployée comme sous l'effet d'une substance illicite. La marée humaine manque de m'étouffer à plusieurs reprises.
J'accélère le pas pour sortir de cette foule de dégénérés le plus vite possible.
Un peu plus loin, près des salles de classe, l'hystérie collective a été remplacée par une violence primale. Plusieurs combats agitent la foule, brisent le plus de règles possible. Les plus vieux de la Pension se sont parqués dans cette partie de l'école pour une démonstration d'autorité puante et bestiale. Rien qu'un pseudo pouvoir illégitime.
Le spectacle attire l'œil et les plus gros egos repoussent les gamins à leurs pieds qui essayent de voir à travers leurs jambes.
Les paris fusent ; les chiffres augmentent et les armes s'échangent de mains en mains. Les tricheurs prennent les enchères et se remplissent les poches. Le sang gicle plusieurs fois, vient rejoindre des traces plus anciennes qui maquillent les murs autrefois blancs.
La mâchoire serrée, je renifle l'odeur âcre de la compétition. La faiblesse des combattants m'interpelle et résonne au plus profond de ma colère refoulée. J'ai la furieuse envie de me défouler sur quelqu'un depuis que Reyna a réussi à m'extorquer des informations sur mon passé.
Ce n'était pas prévu. Je ne devais en aucun cas lui parler de ma mère. T'as merdé, Shade. Oui, je sais. T'aurais dû la laisser partir. Évidemment. C'était une putain de connerie et je le savais à ce moment-là.
Mais je ne voulais pas partir et je ne voulais pas non plus qu'elle s'en aille. On est le 15 mars bordel ! Tout était réuni pour que la session devienne une représentation palpitante. Une valse de fantômes contre la symphonie de sa tristesse. Et moi qui m'incruste pour faire un numéro solo.
Mais elle apprend de ses erreurs, commence à résister. Elle trouve des miettes de failles et retourne la situation. Je ne sais pas encore si ça m'excite ou si ça m'emmerde. Peut-être un peu des deux. Bordel, peut-être que je préférais la Reyna impulsive.
Est-ce que mon échange désespéré valait le coup ? Je ne sais pas encore. Mais ce que je sais, c'est que tout ce qui échappe à mon contrôle me met hors de moi.
Je renonce à m'approcher du cercle, conscient qu'il faut que je garde mon calme. Je m'apprête à partir quand une main se referme sur mon épaule. Je réagis au quart de tour, complètement aveuglé par la chaleur dévorante qui fait bouillir mes veines. Je fracasse mon poing sur le nez de mon camarade sans même m'attarder sur son identité.
Le jeune s'étale par terre, inconscient. Dans une moue dédaigneuse, je secoue mes doigts pour les détendre, puis tourne les talons.
Il faut absolument que je m'éloigne de cette atmosphère électrique avant que la situation ne tourne au cauchemar. Difficilement, je me fraye un chemin parmi les supporters, les trafiquants et les pickpockets. Les uns beuglent leur amour pour leur champion tandis que les autres profitent du chaos général pour faire leurs affaires.
Aux abords du gymnase, des rouleaux de papiers toilettes volent dans tous les sens. Des gamins de dix ans, maculés de graisse pour se faire des maquillages indiens courent dans ma direction, armés de ventouses et de bras mécaniques. Torse nu, ils m'encerclent en criant et tentent de me ligoter avec de la ficelle.
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Manipulation
Science FictionDans le jeu de la ²õ¨¦»å³Ü³¦³Ù¾±´Ç²Ô, il n'y a qu'une seule r¨¨gle : ne jamais tomber amoureux. Reyna vit ¨¤ Ath¨¦a, un pays exclusivement f¨¦minin depuis que la S¨¦paration a eu lieu, scindant ce qu'¨¦tait autrefois les ?tats-Unis en deux parties distinctes, par...
CHAPITRE 18 | PARTIE 1
Depuis le d¨¦but
