PDV:Eden
Finalement Lizy est repartie après avoir versé certainement des litres de larmes, elle qui est de nature si forte et déterminée me brise le cœur. Je n'osais même pas la prendre dans mes bras, ni la regarder dans les yeux. Je me sentais coupable d'avoir fait pleurer ma grande sœur, je ne me sentais pas apte à enlacer Lizy pour la soulager tout comme elle me soulage quand je ne vais pas bien. Parce que c'est moi qui l'ai fait pleurer. Et personne ne mérite d'être consolé par son bourreau. Je me hais définitivement pour avoir fait du mal à une personne que j'aime.
Je me hais.
Je pars dans ma chambre et ouvre ce tiroir, le tiroir que j'ouvre dans les cas désespérés, j'attrape une lame et me la plante dans le doigt sans faire exprès. Un jurons m'échappe alors que je m'apprête à redresser ma main pour faire ce que je fais de mieux. Du mal.
Mais au même moment un sentiment de frustration m'envahit, d'un coup je me sens bête, idiot de penser directement à l'alternative de me faire du mal quand émotionnellement ça ne va pas. Pourquoi ne pas essayer de trouver une autre solution ? Pourquoi ne pas plutôt en parler ?
Parce que tu es faible Eden. Parce que personne n'a envie d'écouter un enfant brisé comme toi. Personne. Tu ne mérite même pas d'être écouter, tu n'es qu'un fardeau pour toutes les personnes qui t'entoure. Couvre ses bras laids et remplis de cicatrices, preuves de ta faiblesse.
Les démons de Eden.
Finalement je trace un trait qui m'arrache un soupire de douleur mélangé d'une satisfaction étrange. Mais aussitôt que je vois le sang couler je me met à culpabiliser et je jette la lame dans le tiroir où elle se trouvait avant et le referme d'un geste brusque.
_Non. Tu es plus fort que ça.
Je me répète cette phrase pendant une bonne dizaine de minutes en sortant de ma chambre et en remettant correctement mon pull sur mon bras salis. Cette fois ce n'était qu'un trait, mais je sais que la prochaine fois je ne serai pas aussi clément. Parce que la douleur s'accumule, et que mon seul moyen de l'extérioriser. C'est la souffrance physique. Puisque c'est toujours plus simple à soutenir que la douleur mentale.
Nélie
Mercredi est passé super vite tout comme le reste de la semaine. Je me suis remise à étudier, et ça m'a fait du bien. La plupart de mes profs se sont adaptés facilement à mon handicap, sauf quelques uns qui n'avaient pas l'air de vouloir comprendre. Surtout un.
Monsieur Viron. Ce prof est une ordure sérieux, quand je lui ai dis en début de cours que j'étais malentendante il a commencé à mal me regarder. Et puis en cours il ne faisait aucuns efforts, pas de notes au tableau, pas de fiches imprimées, rien, Nada. Quel merde ce mec.
J'en ai parlé avec mon frère mais il ne m'a pas cru vu parce que apparemment « Monsieur Viron est super gentil et que j'en fais juste tout un plat ». Que c'est moi qui ne fait aucuns efforts et que je ne lui facilite pas la tache avec tous les autres élèves. Donc en gros, c'était de ma faute. J'en ai donc aussi parlé à la direction mais toujours rien, rien à pars des "je lui en parlerai". Des promesses pas tenues finalement...comme d'habitude. Comme toujours.
Heureusement Minju, elle, me croyait. Elle m'a dis qu'elle aussi avait eu des problèmes avec lui à cause de ses tatouages.Qu'il l'ignorait et qu'il lui lançait souvent des regards froid et désapprobateur alors qu'elle n'avait rien fait. Elle m'a ensuite dis que ce prof n'était pas du tout inclusif et que c'était certainement pour ça qu'il ne nous aimait pas forcément. Ce qui n'est pas une excuse mais aucunes autres plaintes n'ont été déposées contre lui, donc le directeur en déduit que ce sont des mensonges ou des exagérations.
Ce weekend ne s'annonce pas si bien que ça, j'ai un devoir en collaboration avec de...l'art ?! C'est quoi cette connerie encore... Mon devoir se tiens sur l'art-thérapie. C'est une façon de traiter des souffrants mentaux en leurs faisant peindre, dessiner, graver leurs peines et leurs souffrances au lieu de se faire du mal. C'est un sujet assez intéressant à vrai dire, mais ce n'est pas le sujet principal de mes études. Moi je veux devenir psy. Juste psy. C'est peut-être égoïste mais je ne me suis jamais senti attiré par l'art donc je ne vois pas pourquoi je devrais m'y intéresser, mais après tout mes études sont formées de cette manière, alors je vais m'y mettre à fond et faire de mon mieux pour essayer de me familiariser avec l'art-thérapie. Parce que ce qui compte au fond, c'est ce que je vais devenir.
Pour mon devoir je dois me mettre en collaboration avec un étudiant en art, ce qui n'est pas gagné vu que je suis nouvelle et que je ne connais strictement personne à pars Minju et Éli qui ne sont pas dans ce domaine. Je vais donc devoir chercher le mieux possible ou alors me démerder comme je peux.
Seul point positif dans ce weekend, une association qui s'appelle si je me souviens bien : "Malades Mieux Dans Leurs Corps" qui fait une sorte de rassemblement où des étudiants en art, psychologie et sport peuvent y participer. Et bien sûr des bénévoles. Cette association m'a directement marqué quand j'en ai appris l'histoire et surtout la cause. Cette fondation a été créé pour les personnes souffrant de dépression, de baby blues ou encore d'autres troubles. Mais c'est aussi une super occasion de me trouver un partenaire et de pratiquer un peu de conversation avec des malades mentaux. Je suis super heureuse d'y aller. Quand ma prof de psychologie pathologique m'a donné le formulaire pour y aller, j'ai sauté sur l'occasion. L'événement se passe demain matin et se termine en fin d'après midi. J'ai trop hâte d'y être et j'ai déjà prévu des petits trucs sympa pour essayer d'embellir la journée des souffrants.
Eden
_Éli ça fait des semaines que je prévois d'y aller...je sais que notre match tombe se jour la et que je vais rater les entraînements de la matinée et de l'après midi mais je promets à chaque fois à Hanna que je vais y participer et j'ai toujours des contres temps ! Expliquais-je à Éli qui est actuellement affalé dans mon canapé, un oreiller sous le coude.
_Mec je comprends...mais faut vraiment que tu préviennes le coach parce qu'il ne va pas aimé...
_Ouai...je sais. Soufflais-je à bout.
Je suis fatiguée, jongler entre mes études d'art, le basket et l'association je n'ai plus de temps pour moi. Mes démons ne m'aident pas non plus. Mais je ne me demande qu'une chose, avoir la force mentale comme physique d'aller à l'événement de l'association qui m'a sauvée la vie. J'ai promis d'être présent à chaque événements et depuis je ne tiens pas ma promesse, mais cette fois je vais être loyale jusqu'au bout, et puis c'est le seul endroit où je peux partager, parler et rigoler ouvertement avec des personnes qui ne sont pas si différentes que moi finalement.
_Mec...Me dis Éli d'un coup, son ton est bas et sérieux. Il sait tout, en un regard il a tout compris, il m'énerve.
_Quoi ?
_T'es clean ?
Il ne parle pas de drogues ni d'alcool, et il le sais. Il n'est pas mon meilleur ami pour rien, il comprend tous trop vites. Il n'est pas du genre à laisser passer la pitié, il va droit au but, il est cash, et c'est ça qui me fait sentir vivant et pas un petit garçon brisé.
_Non.
_Pourquoi ?
_J'avais mal.
_Mal. Pourquoi ?
_ Mes parents. Ma sœur, moi.
On reste dans un silence rempli de bienveillance, c'est étrange et beaucoup de personnes ne comprendrait certainement pas notre relation, mais si je devais la décrire se serait :Bienveillante et réelle.
Réelle du style on ne se ment pas, on ne se cache rien, on assume et on se parle même si c'est parfois compliqué. Éli m'as toujours compris, il n'essaie pas de me donner des conseils à la con parce qu'il a compris que ça ne marchait pas parce que j'en ai pas envie, il sais aussi que c'est pas la peine de jouer la carte de la pitié parce que je n'en veux pas. J'ai déjà assez pitié de moi pour avoir à supporter la pitié des autres qui de plus est souvent fausse. Le peu de personnes qui ont suent pour ma relation compliquée avec mes parents m'ont toute sortie la même connerie.
« Tu peux m'en parler si tu en ressens le besoin, je ne te jugerai pas, tu sais... »
Ou encore...
« Ho mon pauvre, je suis là si tu as besoin »
Se sont des mensonges, toujours plus de mensonges et de paroles en l'air. C'est pour ça que je ne veux pas de leurs fausses excuses et pitié. Autant ce la fermer si on arrive pas à tenir des promesses ou si on est pas capable de les assumer jusqu'au bout.
Mon meilleur ami fini par se redresser et m'entourer d'un bras réconfortant en me frottant la tête avec son poing pour m'arracher un râle ou un rire, ce qui fonctionne, comme d'habitude.
_Je t'aime mon pote.Me dis Éli en souriant légèrement.
_Tu vas m'embrasser ?
_Salaud.
_Connard.
Il s'étira avant de gratter son torse nu.
_Mec habille toi, sérieux. Finissait-je par râleur en lui balançant son t-shirt.
_T'es jaloux ? Je sais que tout le monde n'a pas mon corps de rêve mais c'est pas la peine pour jalouser. Ria mon pote en mettant le t-shirt sur son épaule comme un vulgaire torchon.