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- Est-ce que ça va ? la voix de la métisse se durcissait un peu et l'ébauche d'un sourire venait maquiller le coin de mes lèvres. OK si t'es dans une situation dérangeante, dis-moi de quelle couleur est ton haut.

- Ça va, t'en fais pas. Juste que je suis bloquée à un arrêt de bus sous la pluie et le bus ne passe pas avant une bonne trentaine de minutes. Et comme je suis à côté du centre commercial l'Illa Diagonal qui n'est pas loin de chez toi, je me demandais si-

- Quel arrêt ? Je viens te récupérer.

- Celui du bus cinquante-neuf, "Diagonal-L'Illa", énonçais-je après avoir légèrement fait dépasser ma tête pour lire l'écriteau au-dessus de l'abris bus.

- D'accord, je mets mes chaussures et je me dépêche d'arriver.

- Merci beaucoup Anastasia.

- C'est normal, à tout de suite !

(...)

Deux heures plus tard, je me retrouvais assise sur le canapé de la métisse, à discuter avec elle de nos projets d'avenir. Je ne savais même pas ce que je foutais ici et pourquoi je n'étais pas rentrée chez moi directement quand Anastasia était venue me chercher.

En réalité, cette dernière m'avait proposé de passer chez elle pour prendre un café et je m'étais sentie obligée d'accepter pour ne pas paraître impolie. Elle s'était déplacée rien que pour me récupérer alors ça aurait été vraiment méchant de ma part de refuser cette occasion. En plus, désolée de le dire comme ça mais Anastasia était vraiment friquée.

Elle vivait avec son copain qui devait avoir autant d'argent qu'elle et, apparemment, elle venait d'une bonne famille. Moi aussi j'aimerais avoir autant de cadres aux murs et de fleurs à chaque coin de pièce. Puisqu'en termes de compositions florales, Anastasia pouvait clairement ouvrir un fleuriste et être rentable sur des années avant de commander la moindre cargaison de fleurs.

- T'as vraiment beaucoup de vases, lui faisais-je d'ailleurs remarquer après que nous ayons cloturé une conversation au sujet des touristes à Barcelone.

Je les avais en horreur.

- On va dire que mon petit-ami est du genre très excessif quand il s'agit de se faire pardonner, laissait entendre l'employée de maisons d'éditions, en jouant avec le pendentif de son collier.

- Oh, Jules est le style de mec maladroit ?

- Non, pas vraiment. Il a fait une grosse connerie, une fois, et même si je lui ai pardonné depuis, il continue de redoubler d'efforts pour s'assurer d'être totalement blanchi.

- Parce-qu'il s'en veut ou juste pour sa bonne conscience ?

- Parce-qu'il s'en veut réellement, du moins je l'espère, ricanait-elle. Ça a bien failli nous coûter notre couple mais... Je pense qu'on n'avait vraiment pas envie que tout se finisse entre lui et moi.

- C'est indiscret si je te demande en quoi il a merdé ?

Désolée mais j'étais réellement le genre de personnes à adorer les dramas. Seulement ceux des autres, les miens m'importaient peu.

- C'est un peu compliqué en réalité, je t'expliquerai bien tout mais il faudrait remonter des années en arrière pour comprendre l'acheminement et... Tout ce que je peux te dire c'est que même lorsque tu penses ne plus jamais aimer une personne, il suffit juste qu'elle soit faite pour toi et t'es fichu.

- Fichu ?

- Ouais, crois-moi que je suis fichue avec Jules.

Le sourire qu'arborait Anastasia me donnait presque la nausée, je trouvais l'amour moche. Surtout quand on n'avait vécu que des échecs cuisants à en pleurer des nuits et des nuits sur son oreiller. Emiliano était peut-être la pire expérience que je n'avais jamais eu et, même Gabriel - mon copain qui avait suivi - n'avait pas réussi à panser ce type de plaie.