Anyone Except U

Je perçus vaguement des flashs de téléphones. L'homme qui m'embrassait, il y a quelques secondes encore, était à terre, tentant de se protéger sous les coups véhéments d'un Andrew furieux.

— Putain, c'est lui qui s'est jeté sur moi !

Mais Andrew n'en avait que faire des excuses de Darrell et continua à s'acharner sur lui.

Quelqu'un se précipita à mes côtés, puis une autre personne, et enfin la brune de tout à l'heure. Isis me regardait, debout, impuissante et confuse. Jacob à genoux sur ma gauche criait mon nom, me demandant sans cesse si j'allais bien. Quant à Uriel, il me serrait contre lui, essuyant la sueur de mon front, silencieux, en colère, attristé, apeuré... aussi dans le flou que les deux autres adolescents qui m'observaient. Autant dans l'ignorance que moi.

Lorsque Darrell fut incapable de se relever, maintenant son nez en sang, en boule sur le sol, Andrew se redressa enfin.

— Appelle les flics !

Il aboya son ordre sur l'un de ses invités avant de courir vers moi. Deux autres de ses amis prirent sa place aux côtés de Darrell, comme pour l'empêcher de fuir.

— Gavyn ? Gavyn, tu m'entends ?

Sa main tapota ma joue tandis que je me sentis partir. Avant que mon esprit s'éteigne pour de bon, une forte gifle me fit rouvrir les yeux.

— Putain, je suis désolé, Gavyn ! Ça n'aurait jamais dû arriver !

Andrew se confondit en excuses alors qu'il continuait de me maintenir éveillé.

— Jacob, va nous chercher de l'eau.

Le cadet regarda son frère, encore choqué de ce qu'il se passait sous ses yeux.

— DÉPÊCHE-TOI !

Jacob se redressa maladroitement avant retourner chez lui à grandes enjambées.

— Putain, ce connard n'aurait jamais dû être là... marmonna Andrew.
— Qu'est-ce qu'il se passe ? l'interrogea Uriel, inquiet.
— Gavyn a été drogué. Sans doute au GHB vu son état.

Encore à moitié dans les bras d'Uriel, je m'accrochais à lui.

— J'ai chaud...

Dans l'amas de flou qui m'entourait, le visage de mon ami fut le seul à m'apparaître clairement. Sans le voir, je parvenais encore à replacer ses traits, aidé par mes souvenirs.

— Uriel... Uriel...

Je n'aurais su dire si je l'appelais à l'aide ou parce que j'étais excité, parce qu'à cet instant présent il était le seul que mon esprit reconnaissait assez distinctement pour me laisser l'appeler. Ses lèvres se posèrent sur mon front pour me calmer.

— Shh, querido.

Des pas lourds se rapprochèrent rapidement. Un verre fut tendu à mon ami qui le prit pour le porter à mes lèvres.

— Il va falloir l'emmener à l'hôpital.
— Son état est grave ? s'inquiéta Uriel.
— Je ne sais pas... Mais rester ici ne l'aidera pas non plus, lui explique Andrew. Attends j'appelle mes parents. Si tu as les coordonnées des siens, je te conseille de le faire aussi.

— Tu es vraiment obligé de prévenir papa et maman ? Tu es adulte, Drew, ça ne peut pas rester entre nous ?
— Ce qu'il se passe est sérieux, Jacob !

Andrew se redressa puis intima à tous les invités de rentrer. La maison se vida peu à peu ; Uriel, les deux amis qui gardaient un œil sur Darrell et Isis furent les seuls restants. Cette dernière fut pourtant très vite congédiée par Uriel. Il demanda à Jacob de la raccompagner, sans jamais détourner ses yeux des miens.