R.A.I.A

— Non, je ne retournerai pas à l'hôpital ! Je ne veux pas passer les derniers moments qu'il me reste à entendre des conneries !

— Mais tu ne vas pas mieux, tu dois faire des examens ! On sait peut-être la vérité, mais ce n'est pas une raison pour...

— Si, ça en est une ! Ils nous ont toujours mentis, je ne leur fait plus confiance.

Je ne savais depuis combien de temps mes pères se prenaient la tête, mais je n'osais pas les interrompre. Au fond, ça me faisait de la peine de les voir abandonner et se disputer davantage chaque jour. Je savais qu'ils ne le faisaient pas devant moi pour ne pas m'inquiéter, mais je les surprenais de plus en plus fréquemment.

— T'es toujours aussi borné, j'y crois pas... Chéri, c'est de ta santé qu'on parle, là !

— Je t'emme...

Je rentrai brusquement, coupant mon père dans le début de ses insultes.

— Oh, mon ange, déjà de retour ? s'étonna ce dernier.

Je rangeai calmement mes récoltes de la journée, feignant de ne rien avoir entendu de leur conversation.

— Oui, déjà. Mais si ça te dérange, je peux venir encore moins.

— Non, pas du tout, ce n'est pas ce que... paniqua-t-il.

— Je rigole, papa. Je dois y aller de toute façon.

Sur ces mots, je partis sans rien dire, sous leurs yeux surpris. Je claquai la porte derrière-moi et sortis me promener. Arrivée devant RAIA, je montai les longs escaliers en métal qui menaient sur le toit du petit immeuble d'à côté et m'y allongeai.

Je commençais à prendre l'habitude d'observer le ciel. Que ce soit dans le présent où dans le passé. Voir cette différence frappante me faisait prendre conscience de la réalité dans laquelle nous vivions tous.

Après une bonne heure à n'observer que cette brume opaque, je descendis pour rejoindre mes amis. Pour ne rien changer, Shay restait de mauvaise humeur, figée sur ses livres ou ses peintures. Gabriel et moi discutions de tout et de rien, Kyle était scotché à ses écrans tandis que Neziah passait plus de temps à jouer de la batterie et à chanter qu'à se joindre à nos conversations.

— Comment va ton père ? Je ne vois pas de nouveaux résultats dans son dossier, s'inquiéta Kyle.

Cela commençait à faire quelques semaines que je n'en parlais plus. Je m'étais résigné de l'approche de son décès, mais en parler me faisait bien plus de mal que je voulais bien l'accepter.

— J'en sais pas plus que toi. Il ne va plus à l'hôpital... Je crois que je n'aurais rien dû lui dire tant que je n'avais pas trouvé de traitement.

Gabriel me sourit tristement, voulant probablement me rassurer. Kyle, de son côté, jeta un regard noir à Shay qui semblait l'ignorer volontairement.

— Tu as fait ce qu'il te semblait le mieux sur le moment, tu n'as pas à t'en vouloir. Dans tous les cas, ça ne change pas grand-chose. Comme tu l'as dit, sans traitement, tu ne peux rien faire, souffla l'aîné du groupe.

Lui aussi regarda étrangement Shay. Je commençais à comprendre qu'ils me cachaient tous une information importante, et ça me tendait de plus en plus.

— Bon... l'un de vous aurait la gentillesse de me dire ce qu'il se passe ? Pourquoi vous regardez Shay comme ça ?

Neziah stoppa ses instruments, Gabriel et Kyle se tendirent en synchronisation. Shay, elle agissait comme si je n'avais prononcé aucun mot. Le silence devenait pesant.

— Shay... supplia Gabriel.

— Fermez-là, je suis au moment où l'ennemies devient lovers !

La batteuse leva les yeux au ciel et retourna à ses occupations, coupant ce silence glacial. Pourtant, l'ambiance électrique de la pièce ne changea pas. Je m'apprêtais à hurler de frustration, mais une notification retentit sur l'ordinateur de Kyle. Son regard n'avait rien de rassurant. Puis une larme coula discrètement sur sa joue. Dans la seconde qui suivit, je reçu un appel de mon père, Daemon. Je décrochai, paniqué. Je n'eu pas le temps de souffler le moindre son, il me devança.

— Chéri, viens immédiatement à l'hôpital. Papa ne va vraiment pas bien.

Le cœur battant à toute allure, des gouttes de sueur perlant sur mon front, je commençais à partir.

— Désolé, c'était mon père, Daemon. Mon père, Raziel, est à l'hôpital. Je dois y aller.

Tous, sauf Kyle, devinrent blanc et le regard triste. Shay releva la tête en ma direction, les larmes aux yeux.

— Espèce de con, pourquoi tu ne nous dit ça que maintenant ?